Paul Fabien Perret-Gentil (1895-1973) et sa fille Fabienne Faby (1915-2002), fondatrices* du Théâtre de Poche, ainsi nommé en 1948, ont rêvé ensemble // un lieu où pourraient être jouées des pièces d’avant-garde, des créations //. Elles inaugurèrent le 18 mars 1948 la scène du Théâtre de Poche situé au premier étage d’un immeuble du 19 Grand-Rue avec La putain respectueuse de Jean-Paul Sartre, alors tout juste publiée. Le plateau faisait quinze mètres carrés et la salle contenait cent places. Là, les actrices Fabienne Faby – la directrice du jeune théâtre –, François Simon et William Jacques, une bande d’amies genevoises d’une trentaine d’années, jouèrent ce texte d’avant-garde. Ainsi commence l’histoire du POCHE.
Ce qui frappe à la lecture des programmes des 75 saisons théâtrales du Théâtre de Poche, nommé aujourd’hui POCHE /GVE, en particulier lorsque l’on s’attarde sur les distributions des spectacles, est la manière dont celles qui firent exister ce théâtre furent d’abord des actrices. Ces actrices étaient organisées en groupes, on dit « troupe », sans que celles-ci n’aient pourtant jamais, jusqu’à peu, été institutionnalisées. Il s’agit donc de rassemblements, d’un Ensemble au fil des ans fluctuant composé de personnes qui partent, reviennent, repartent, etc. Toutes les directrices du POCHE, à l’exception de mAthieu Bertholet (formé en tant qu’auteur dramatique), ont d’ailleurs d’abord été des comédiennes, des personnes animées dans leur passion pour le théâtre par le plaisir de jouer.
Julie Rosello-Rochet, septembre 2022
Extrait du premier cahier de salle de la saison (RE)CYCLE intitulé Esprit de Troupe
75 ANS d’un théâtre né du désir de faire un théâtre, du théâtre à Genève, aujourd’hui. Dans la Genève de l’Après-Guerre, du retour à la normale, les actrices *, metteures en scène, auteures romandes ont voulu garder la place qui leur avait été donnée par la fermeture des frontières. Les tournées parisiennes avaient fait défaut et les productions suisses romandes avaient pris leur place, ne laissant aucun plateau abandonné.
Les artistes n’appelaient pas ça troupe ou ensemble, mais elles tenaient toutes les places, tous les rôles, sur la scène et dans les coulisses. Même si des coulisses il n’y en avait pas, dans ce théâtre improvisé dans le salon d’un (très grand) appartement de la Grand-Rue. Elles n’appelaient pas ça répertoire mais les pièces se jouaient des saisons entières, les unes à la suite des autres, deux ou trois dans la même soirée (on n’aimait pas, dans les années cinquante, que sa soirée de théâtre dure moins de trois heures…). Elles n’appelaient pas ça émergence, et pourtant, beaucoup de celles qui ont fait le théâtre à Genève pour les cinquante ans qui suivirent ont été servantes, majordomes, gendarmes, assistantes pour la première fois au POCHE. Elles osaient à peine le dire, pourtant, ce sont bien des femmes qui ont fait ce théâtre à ses débuts et pendant longtemps : Fabienne Faby, Marcelle De Kenzac, et Martine Paschoud et Françoise Courvoisier de nos jours. Et elles ont eu le culot d’ouvrir le Théâtre de Poche avec un auteur à peine connu à l’époque, Jean-Paul Sartre, et un titre LA PUTAIN RESPECTUEUSE qui a dû ébranler bien des calvinistes !
mAthieu Bertholet, extrait de l’édito de la saison (RE)CYCLE pour les 75 ans du POCHE /GVE
Nous remercions chaleureusement la Bibliothèque nationale suisse, Cabinet des estampes: Collection d’affiches, les Archives de la ville de Genève, la Bibliothèque de Genève ainsi que la Fondation SAPA qui nous ont permis de réunir ces archives.
18 Mars 1948 – création du Théâtre de Poche au 19 Grand-Rue dans la Vieille-Ville de Genève sous l’impulsion de de l’éditeur genevois Paul Fabien Perret Gentil. Sa fille Fabienne Faby prendra la direction du théâtre.
1948 à 1961 – Fabienne Faby
1961-1962 – Fermeture puis réouverture avec le soutien
de la Ville de Genève 7 Rue du Cheval- Blanc
1962 à 1975 – Richard Vachoux
1975 à 1984 – Gérard Carrat
1984 à 1996 – Martine Paschoud
1996 à 2003 – Philippe Morand
2003 à 2014 – Françoise Courvoisier
2015 à aujourd’hui – mAthieu Bertholet
Août 2022 – la Rue du Cheval-Blanc devient
Rue Marcelle-De-Kenzac en l’honneur de la
fameuse metteure en scène, qui œuvra
entre autres théâtres sur les planches du POCHE et
qui était également l’épouse de Paul Fabien
Perret-Gentil et la belle-mère de
Fabienne Faby.